Autour d’une certaine éthique et philosophie de la pêche de la carpe.

(La carpe est-elle philosophe ? Probablement plus que le pêcheur) 

Ethique et philosophie de la pêche de la carpe. 

" La Pêche de la Carpe à la Ligne condense en elle seule toute une Ethique et une Philosophie complète" ce sont ces quelques mots écrits par le Docteur Ernest Sexe dans son livre " La carpe de rivière " parus en 1937 qui me sont venus à l'esprit lorsque j'ai pensé à une certaine philosophie liée à la pêche en général et à celle de la carpe en particulier pour ce qui me concerne. Presque personne ne doute d'une éthique liée à la pêche de la carpe, tout simplement parce que tous les pêcheurs de carpe pensent qu’ils ont une éthique. Bien sûr elle est d'un point de vue personnelle variable de l'un à l'autre mais c'est déjà un début puisque pour tous le respect du poisson est mis en avant Pour ce qui est de la philosophie, n'étant pas " philosophe " et n'ayant jamais abordé ce sujet à l'école il m'est assez difficile d'en parler mais je vais tout de même tenter, même si cela est prétentieux, de donner mon point de vue. Pour commencer pour y voir une éthique et une philosophie il faut en définir les mots. Le mot “éthique “ est un terme qui concernerait la science de la morale. Pour le commun des mortels que nous sommes, essayer d’avoir une attitude honorable et humaniste vis à vis de ce qui nous entoure, la pêche de la carpe en l’occurrence avec tout ce qui l’entoure. Ce mot “éthique “ est donc une vision variant d’un individu à l’autre Le mot "philosophie " vient de l'assemblage de deux mots Grecs " Philein " qui veut dire Aimer et "Sophia" qui veut dire Sagesse. L'amour et la sagesse en un seul mot. Pour nous pêcheurs de carpe cela voudrait probablement dire : " aimer la pêche avec sagesse". La philosophie a aussi un rapport à la nature. Savoir s'y soumettre sans abdiquer bien sûr car le mot soumission dans ce cas veut dire accepter de composer avec elle, de la prendre en compte et ne pas se croire plus fort qu'elle car en fin de compte c'est elle qui dirige tout, à nous de nous y adapter. L’ensemble de ces deux mots concernerait donc pour nous le fait d’essayer d’avoir un sens moral et une forme de sagesse vis à vis de la pêche de la carpe dans son ensemble, c’est à dire vis à vis de la pêche mais aussi de la carpe de la nature des autres pêcheurs et de nous-même. Lorsque le Docteur Sexe écrivit ces mots sur la philosophie dans la pêche de la carpe en 1936/37 les mentalités ou l’approche de la pêche de la carpe n’étaient pas tout à fait pareilles à celles d’aujourd’hui. A cette époque on pêchait en priorité pour l’assiette et ensuite pour certains c’était aussi pour le plaisir. La pêche de la carpe était une pêche pratiquée par “ les vieux” car c’était déjà une pêche d’attente, il fallait probablement avoir un tempérament de “sages “que seul un certain âge permettait d’avoir. Alors oui le docteur Sexe et bien d’autres mangeaient des carpes, ils avaient une part d’humanité et bien que n’étant pas 100 % carpistes ils étaient 100% pêcheurs et respectaient tout autant ce poisson voire plus que beaucoup de pêcheurs d’aujourd’hui. En ce sens oui ils avaient probablement une philosophie leurs permettant d’être en harmonie avec la nature lors des parties de pêche. De nos jours certains pêcheurs pensent qu’ils ont une forme de philosophie plus poussée puisque ils relâchent les poissons dans leur élément, ils s’adaptent aux climats de façon plus importante qu’autrefois puisque ils pêchent la nuit mais aussi l’hiver. Je ne pense pas que pêcher plus, pêcher mieux rende plus philosophe pour autant, la philosophie et la pêche sont je crois deux choses différentes. Propre plaisir ou plaisir “coupable” Je trouve dans la pêche de la carpe à la ligne un paradoxe marquant. Comment en effet certains “carpistes” peuvent-ils fustiger ceux qui pêchent pour manger le poisson alors que ceux (dont je fais partie) pratiquent ce que les Français appellent “No Kill” qui est le fait de remettre le poisson à l’eau en bonne santé malgré le trou d’un hameçon dans la bouche. Comment certains donc peuvent-ils juger de façon négative ceux qui pêchent pour se nourrir alors que nous, nous pêchons pour le plaisir ? Le nôtre, notre “bon” plaisir bien entendu. Prendre du plaisir en plantant des hameçons dans la bouche des poissons afin de les amener contre leur gré à se rendre à l’épuisette n’est-ce pas un peu malsain ? Pire même c’est toujours contre son gré que l ‘on maintient un poisson hors de l’eau durant quelques minutes pour faire une photo orgueilleuse où bien souvent la vedette c’est NOUS. Pour ce qui me concerne c’est un plaisir égoïste sans soucis du reste. Oh bien sûr ce fameux “NO KILL “ nous donne bonne conscience par rapport à ceux qui mangent et donc tuent le poisson. Une bonne conscience hypocrite car je ne dois pas être le seul à douter que le poisson lui partage notre plaisir, pas plus qu’il n’éprouve le syndrome de Stockholm. Ces choses-là, il suffit de l’admettre presque de s’en accommoder car en fait ce n’est pas bien grave. Il n’y a pas mort d’homme, ni de poisson non plus. Alors oui c’est au un plaisir coupable. Et là, la philosophie qui nous pousse à nous soumettre à la nature bat de l’aile puisque c’est le pêcheur qui soumet un poisson. On pourrait presque parler de plaisir doublement coupable lorsque l’on utilise des appâts fabriqués avec de a farine de Krill par exemple puisque l’on contribue à détruire un équilibre naturel pour assouvir un désir qui lui n’a plus rien de naturel. A la pêche la partie invisible n’est visiblement pas uniquement celle qui est sous l’eau mais également ce qui concerne les appâts issus d’animaux en voies de périls, double paradoxe que l’éthique du pêcheur dit “moderne” Il y a pourtant du positif avec les plaisirs de la pêche car il n’y a pas que l’aspect prise de poisson qui compte. Pour certains le fait d’être au bord de l’eau voler du temps au temps, (même au mauvais temps) replonger dans la nature apprendre à l’apprécier, oublier les soucis du quotidien, s’évader d’une vie trépidante pour revenir à plus de naturel, deviner où est le poisson, le piéger doucement bref nous partageons une grande partie des mêmes plaisirs qu’avaient probablement les pêcheurs d’autrefois qui passent aux yeux de certains carpistes modernes pour des barbares puisque ils mangeaient le poisson eux. Pourtant nous n’en sommes pas si éloigné sur certains points, ceux de la pêche tout simplement. Dis-moi comment tu pêche la carpe je te dirais qui tu es. Selon que l’on pêche la carpe en force ou en finesse exprime une certaine manière d’être et de penser. Si l’on pêche en force c’est en générale parce que l’on choisit un endroit généralement encombré tout simplement parce que c’est là que les carpes sont les plus faciles à faire mordre dans la mesure où c’est généralement un lieu où elles se réfugient, un lieu de sécurité. Elles s’y regroupent donc bien plus là qu’ailleurs et il n’est pas besoin d’amorcer longtemps à l’avance juste devant les encombrements et cela suffit. La pêche en force ne demande par conséquent pas d’être fin dans la manière de chercher, d’attirer le poisson et de le combattre, il faut avoir une canne et une ligne solide, seule la force brute est nécessaire. Point de finesse pas de stratégie élaborée mais du simple. Le pêcheur n’a pas besoin de démontrer des qualités de recherches et de finesse. Si l’on pêche en finesse il en va autrement, c’est généralement parce que le lieu le permet, que ce soit en rivière ou ailleurs, là il faut une stratégie plus élaborée, des montages plus délicats et une manière de combattre le poisson plus subtile. Le pêcheur devra donc faire preuve de plus de délicatesse de recherche et de persévérance car généralement il faut mettre un amorçage plus long en place. La mentalité du pêcheur est différente de l’un à l’autre. Pour une pêche à roder ou alors avec des techniques peux usitées comme la pêche avec une canne pour la pêche à la mouche là le pêcheur devient plus traqueur, ce sont des techniques décalées et dans ce cas le pêcheur est décalé, curieux, extraverti même. Il se peut même que l’on soit plus globe-trotter et que la pêche nous pousse à aller vers des lieux inconnus, là l’aventure est plus incertaine, on vogue vers l’inconnu.  On peut encore affiner le diagnostic puisque la manière de pêcher est symptomatique du caractère du pêcheur.  Selon que l’on pêche régulièrement seul ou avec un ami, selon que l’on pêche en hiver ou seulement à la belle saison. Selon que l’on pêche en rivière uniquement ou alors un peu partout. Suivant que l’on possède le dernier matériel à la mode ou alors que l’on soit fidèle à un matériel plus patiné par le temps. Alors oui la manière de pêcher permet de comprendre un peu le pêcheur.  Le docteur Ernest Sexe avait bien raison de trouver toute une éthique et une philosophie dans cette pêche. Pour ma part je n’en suis pas encore là pour ce qui concerne mes contemporains, certains ont une éthique irréprochable à mes yeux, là où pour d’autres elle est élastique. Pour ce qui est de la philosophie elle est propre (parfois) à chacun.